Un autre agronome pour juguler la faim

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Un autre agronome pour juguler la faim

Le secret est devenu polichinelle depuis dimanche dernier avec l'officialisation du choix d'Ericq Pierre comme premier ministre.

Ce grand'Anselais d'origine aura la lourde responsabilité de juguler une crise économique aigue accentuée par la hausse du céréale sur le marché international.

En effet, Ericq Pierre a déjà été désigné premier ministre dans des contextes socio-politiques certes différents au beau milieu des années 90 après le départ de la primature de Rosny Smarth, OPListe convaincu.

Si à l'époque il était question de conflit politique entre une majorité parlementaire et lexécutif dirigé toujours par René Préval, aujourd'hui la situation est toute autre.

Il s'agit du constat d'échec d'une politique économique inadaptée consécutive à plus de vingt ans d'application des choix imposés par le système financier international (SFI).

En 1997, Ericq Pierre a été rejeté par Paul Denis et ses pairs au sénat de la République.

Ils prétextaient que l'intéressé n'est pas haitien d'au moins de la deuxième génération, en référence à l'article 11 de la constitution de 1987. Du bicentenaire au Champs de Mars, Paul Denis est encore là.

Cette fois enfourchant sa tunique de conseiller présidentiel, il a assisté de près à la redésignation d'Ericq Pierre.

Assurément Paulo a du avouer les véritables raisons de l'éviction du représentant d'Haiti à la BID qui étaient bien politiques donc une vraie farce sénatoriale.

Car aucun mentor digne de son nom n'aurait accepté qu'un chef d'Etat commette une erreur plus d'une fois. Alors à moins d'une nouvelle farce, Ericq Pierre deviendra le successeur de Jacques Edouard Alexis qui, ironie de l'histoire s'était vu sourire la primature après la décision du sénat en 1997.

Ainsi, Ti Ericq pour ses admirateurs et les intimes pourra passer plus de temps sous le soleil.

Renouer avec la douceur des brises loin des gratte-ciel washingtoniens.

Son nouveau poste lui permettra un jour de faire le trajet Port-au-Prince/Jérémie en voiture, avec des escales indispensables pour tout dyagnostic de la réalité haitienne.

Ici, le Canapé Vert, ceinturé par la Rue Rosa, un bidonville en devenir ; le Champs de Mars, d'où il projettera ses regards sur Le morne l'Hopital avec ses inombrables constructions anarchiques.

En passant par La Saline, Cité de Dieu ce spectacle hideux, avec dans son sillage le défunt théâtre national; Là, Les cayes, cette ville où a été donné le ton au début du mois et qui se réveille timidement de ces émeutes.

Et les cascades Rampe accueillantes comme elles seules à l'entrée de Fanm pa dra exquisseront une idée des travaux à entreprendre au niveau de ce troncon.

A son retour, il lui sera permis de survoler l'ile en hélicoptère pour découvrir la nouvelle Haiti.

Ses misères, ses bidonvilles, ses déboires, sa déforestation, son délabrement, ses plages, ses richesses, et aussi ses nombreux refuges où germent encore des lueurs d'espoir.

Espérant que ce premier ministre saura entendre les cris de ce pays qui a vu défiler en une semaine une vingtaine de diplomates.

Venus tous, exprimer leur solidarité avec les autorités politiques, réajuster Cité Soleil dans sa misère à travers les distributions humiliantes d'aide alimentaire, mais aussi réaffirmer leurs promesses de dollars et d'euros à ces huit millions de pauvres que je porte dans ma voix.

Une fois le cap de la ratification franchi, le nouvel occupant de la Villa d'Accueil devra s'attaquer aux problèmes réels du pays. Dans le conjoncturel, il y a la cherté de la vie, la crise énergétique, les élections sénatoriales et indirectes et encore l'insécurité intermittente...Dans le structurel, un pays en ruine dont le budget dépend à plus de 60% de l'international ; une société gangrénée par toute sorte de maux, résultant de l'absence de vision future pouvant résorber la crise séculaire dans laquelle s'enlise Haiti avec une dette extérieure estimée à 1.4 milliard de dollars; ou encore un manque de planification et de développement à travers une politique publique ne correspondant pas aux besoins des citoyens et citoyennes dans tous les domaines.

Tourisme, Education, Santé, Communication, Gestion des Ressources humaines, Infrastructures, Urbanisme...

Al contrario d'un programme axé sur le développement participatif de l'Homme Haitien qui ne sera plus en transit sur son propre territoire et des choix économiques visant à relancer la production nationale.

Mais à vrai dire ce ne sont là que des hypothèses.Car le personnage en question est l'un des promoteurs des vertus des institutions financières internationales.

Selon l'humeur du moment ou de la situation des pays où elles s'appliquent, ces politiques sont vendues sous de nombreux épithètes. Pour euphémiser on parle de programme d'ajustement structurel, de modernisation des entreprises publiques, de cadre de coopération intérimaire (CCI), de document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP), à implémenter dans les pays post crise.

En réalité le rapport de synonymie entre ces nombreux concepts c'est que tous renvoient à l'application du plan néolibéral, à l'exécution des diktats de la communauté internationale.

Toujours accompagnés de leur cortège funéraire: affaiblissement de l'Etat, augmentation du chomage, endettement massif, paupérisation, destruction des infrastructures de production locale.

Donc, une nouvelle forme de colonisation en vigueur dans les pays tiers mondistes avec la complicité des intellectuels organiques de ces pays-là.

Le premier ministre désigné est un fin connaisseur des officines du SFI. D'ailleurs il a beaucoup oeuvré pour l'allègement de la dette d'Haiti estimée à 525 millions de dollars américains dans le cadre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

Mais aujourd'hui pour s'adapter au discours de l'heure qui se veut le procès du plan néolibéral, Ericq Pierre doit être l'homme de la rupture.

C'est-à-dire trahir ses propres convictions néolibérales, réévaluer les prêts de la Banque Mondiale, de la BID et du FMI, pour s'assurer une bien meilleure place dans le livre d'or de la Cité des poètes, ou sur les murs de l'Avenue Christophe considérée comme l'avenue des Universités. Ce qui bien sur s'apparente à une utopie.

Toutefois, comme avocat des causes désespérées qu'il se fait appeler lui même, il devra considérer dans sa déclaration de politique générale une autre approche de ces programmes d'ajustement.

Au moins humaniser le néolibéralisme ou le socialiser, intégrer le volet production nationale dans le DSNCRP.

Cela l'épargnerait de quelques diatribes dans les émissions de libre opinion, car l'histoire retiendra qu'il avait tenté quelque chose.

A ce niveau, les mouvements sociaux ont un role primordial à jouer dans une mobisilation constante visant à exprimer leur refus de l'application aveugle des diktats des institutions de Breton Woods en prenant les dispositions nécessaires pour empêcher tout détournement politique de ces revendications sociales.

Une façon de dire que la période des cartes blanches est terminée.

En tant que baptisseur de citadelle, promoteur d'un nouvel espace public, je continue moi même de croire qu'Haïti est un pays qu'il faut réinventer avec d'autres couchers de soleil, d'autres printemps, sans la hantise des cimetières malgré l'odeur trop humaine des villes et le stress des boulevards.

Cependant si l'agronome Pierre ne peut trouver la force nécessaire pour transformer le désespoir de ses compatriotes en énergie galvanisatrice et redonner vie à la terre...Espérons tout de même que Jérémien de son état, il pourra nager.

De quoi assurer sa sortie dans cette galère, avant de recevoir un « Je t'aime moi non plus » en plein visage.

Eddy-Jackson ALEXIS
alexis2ajh at yahoo.

fr

Lundi 28 Avril 2008

Eddy-jackson Alexis, May 1 2008, 7:35 PM

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