TRAHISON de René Garcia Préval Haïti en faillite

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On parle d'Haïti uniquement en cas d'agitation ou de catastrophe naturelle.

Le reste de l'année, le drame muet vécu par le pays est soigneusement passé sous silence.

Haïti est sous occupation militaire commencée par le Canada, les États-Unis, la France et le Chili, continue depuis juin 2004 avec des Casques bleus formant la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah).

Cette occupation a été dénoncée à de nombreuses reprises et pour plusieurs raisons.

Malgré le but officiel de maintien de la paix de cette mission, environ 10 000 personnes ont été tuées et 35 000 femmes violées depuis son déploiement.

Cette mission n'a pu protéger la population.

Cette mission est composée d'armées ayant un lourd passif de violations des droits de l'homme.

On peut citer la Jordanie, le Népal, le Chili, le Brésil, l'Argentine ou encore le Pakistan...

Vue ainsi la participation à des meurtres et à des viols devient beaucoup moins surprenante.

Pendant une courte période, on trouva même, à la tête des forces armées de la Minustah, un ancien agent de la police politique de Pinochet, la CNI. Toute occupation d'un pays est révoltante.

Mais dans ce cas, il est clair que la Minustah s'apparente à un bras armé de René Garcia Préval et de ses maîtres impérialistes en l'absence d'une armée locale.

René Préval depuis son arrive au pouvoir a déçu ceux et celles qui plaçaient leurs espoirs en lui. Il n'a pas remis en cause l'occupation et il est parti en tournée au Brésil, en Argentine et au Chili pour féliciter les dirigeants de ces États pour le " splendide " travail que la Minustah a fait en tant qu'armée putschiste.

Il n'a même pas critiqué les abus notoires de la Minustah, sans même parler du droit à l'autodétermination des Haïtiens et Haïtiennes.

Au lieu de cela, il a clairement demandé aux troupes de rester.

De plus, après avoir relâché une poignée de prisonniers politiques, Préval continue de laisser pourrir les autres (environ un millier) dans les donjons de Port-au-Prince.

Toutefois, les politiques de ces trente dernières années ont de plus en plus dégradé l'économie qui est traditionnellement paysanne, au point de provoquer un exode rural massif vers les ghettos des grandes villes où la population vit dans des conditions inhumaines.

Plusieurs raisons à cette crise agricole: d'abord Haïti a toujours pratiqué des tarifs d'exportation élevés se répercutant des marchands et intermédiaires.

Deuxièmement, depuis les mesures d'ajustement demandées par le FMI et appliquées sous le premier gouvernement Préval, les tarifs à l'importation ont diminué à des niveaux astronomiquement bas (3 % pour le riz) ruinant la paysannerie locale mise en concurrence avec les exploitations agricoles américaines subventionnées. Résultat: la dépendance aux denrées alimentaires étrangères a augmenté et la population souffre de la faim. Avec l'exode rural, le chômage est en augmentation constante.

C'est dans ce milieu que de nombreux ateliers de la sueur locaux et étrangers prolifèrent en exploitant le travail pour 1,85 dollar par jour, sans conditions de sécurité et avec des horaires exténuants.

Cela n'a pas créé un " Taiwan des Caraïbes ", comme promis dans les années 70, et n'a pas résolu le problème du chômage.

Tout ce que ce pseudo-développement a amené, c'est l'augmentation de la dépendance et de la fragilité de l'économie haïtienne et le nivellement par le bas des salaires et des conditions de vie. Les travailleurs et les travailleuses de ces ateliers dans la zone de libre-échange de Ouanaminthe, près de la frontière dominicaine, ont été victimes de violences pour avoir tenté de se syndiquer et ont parfois été obligé-e-s de travailler sous la menace des armes en 2004. Toutefois, le gouvernement Préval se réjouit du Hope Act, adopté par le Parlement américain en décembre, qui autorise certains produits haïtiens (principalement issus de l'industrie textile) à entrer sur le marché américain avec peu ou pas de tarif douanier.

Le gouvernement insiste en disant que cela créera des emplois mais il a été démontré que ce type d'investissement non seulement échoue à créer des emplois mais diminue en plus les conditions de vie générales.

Ce n'est encore qu'un argument hypocrite de la part de Préval pour justifier son désengagement du secteur public et sa réticence à s'occuper de la crise paysanne.

Certains disent Q'Une crise d'État et une crise du réformisme.

Mais quels que soient les choix opérés par Préval, il serait trop simpliste de considérer son retournement de veste comme une trahison.

La situation actuelle révèle une crise beaucoup plus profonde.

Premièrement, le capitalisme haïtien est un des plus improductifs et parasitaires que l'on puisse trouver, reposant principalement sur une culture de rente et une main d'Å"uvre pas chère sans production significative et où tout doit être importé.

Ceci a engendré un État complètement déformé qui agit comme une machine à enrichir les parasites de la société.

En fait dans un pays avec un marché intérieur aussi restreint, la politique reste un des seuls moyens de gagner de l'argent pour les classes moyennes et supérieures de la société haïtienne.

Historiquement, cela a été fait par l'imposition indirecte de la paysannerie et, plus récemment, par la mise à disposition d'une main d'Å"uvre bon marché (dans les zones de libre-échange) et par la corruption.

Ce dernier procédé d'enrichissement par la politique a été exacerbé par l'effondrement de la structure de production haïtienne, précaire et dépendante.

Cela est évident lorsque l'on sait que le blanchiment d'argent, et l'aide humanitaire jouent un rôle beaucoup plus grand que toute activité de production.

Deuxièmement, l'expérience réformiste d'Haïti a prouvé ses limites: le réformisme requiert un secteur public de l'économie pour prendre en charge des projets dans l'éducation, la santé...

qui tendraient à améliorer les conditions de vie dans les pays du tiers-monde.

Mais, à Haïti, l'espace pour le réformisme est très limité voire inexistant.

Tout a été privatisé, l'économie s'est effondrée et depuis les ajustements (condition sine qua non au retour d'Aristide en 1994) qui ont fait d'Haïti une des économies les plus ouvertes du monde, il n'existe pas de conditions nécessaires à l'accumulation de capitaux pour l'investissement dans les services publics.

À Haïti, 80 % du service public est fourni par la charité internationale et 65 % du budget de cette année par des dons internationaux.

L'État n'est qu'une coquille vide pour payer la dette externe et donner une voiture toute neuve aux politiciens.

Il ne peut même pas remplir son rôle répressif, vu qu'il doit, pour cela, compter sur l'occupation internationale !

Au vu d'un scénario aussi noir, certains réactionnaires veulent qu'Haïti soit déclaré " en faillite " pour qu'il devienne un protectorat américain ou onusien.

Ils ont raison sur un seul point: le modèle politique, économique et social développé à Haïti pendant la majeure partie de son existence républicaine a complètement échoué.

Mais ce n'est pas un échec du peuple haïtien.

Ce n'est pas un échec des esclaves révolutionnaires de 1791 ou de leurs descendants.

C'est l'échec d'une infime mais puissante partie de la classe dirigeante haïtienne et de leurs maîtres impérialistes de Washington et de Paris.

Pour une rupture radicale Depuis longtemps il y a une fracture entre l'État et les institutions du peuple.

C'est à ces gens, de la base vers le sommet, de surprendre le monde encore une fois avec leur capacité créative, de se libérer de l'ancien ordre et d'en construire un nouveau: le capitalisme ne peut être réformé, il doit être enterré sous les fondations du socialisme.

L'État doit laisser la place à des institutions qui permettront l'émancipation des pauvres, des travailleur-se-s et des paysan-ne-s et du reste de la société et qui décentraliseront le pays. Comment ces institutions pourraient-elles fonctionner?

La réponse est dans le vaste réseau organisationnel et dans l'expérience des classes opprimées haïtiennes.

Haïti est un exemple de pays complètement ruiné par les interventions impérialistes, par l'avarice de la classe dominante.

Il n'y a pas d'autre issue qu'une rupture radicale avec l'ordre actuel.

Cela pourrait être difficile, très difficile, presque aussi difficile que d'abolir l'esclavage au XVIIIe siècle, mais réformer le système actuel est impossible.

Malgré tout, les Haïtiens et les Haïtiennes seront tôt ou tard maîtres de leur destin.

José Antonio Gutiérrez Danton traduits par Rémi (AL Montrouge) et Gaëlle (AL Nantes)

Alain Saintalbin, July 8 2008, 7:08 PM

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